Un CRIAVS pour travailler avec les professionnels : les docteurs Gabrielle Aréna et Daniel Zagury expliquent son fonctionnement.
Il s’agit du centre de ressources pour intervenants auprès d’auteurs de violences sexuelles. Donc comme le nom l’indique, nous ne travaillons pas directement avec les auteurs de violences sexuelles, mais avec les professionnels qui s’en occupent. Des professionnels de trois catégories : les soignants, les professionnels de justice, et les professionnels du milieu socio-éducatif.
C’est une mission de formation autour de la clinique des auteurs de violences sexuelles, une mission de documentation, et surtout une mission fondamentale qui est une mission de créer des réseaux, précisément, et des liens entre les professionnels de la justice et les professionnels du soin.
Dans le contexte actuel, où la violence sexuelle semble effectivement – en tous les cas est une des préoccupations des politiques et des gouvernements – les objectifs c’est : comment prendre en charge ces sujets qui sont, vous le savez maintenant, en obligation de soins lorsqu’ils ont fini leur peine de prison. Donc c’est évidemment quelque chose qui est nouveau pour nous psychiatres, puisque nous n’avons pas été formés à cette clinique et à cette prise en charge.
C’est une redistribution des cartes autour d’un réaménagement des rapports de la santé et de la justice autour de ces sujets qui ne sont pas des malades à proprement parler. Et le rôle du centre ressources, c’est d’aider les médecins ou les psychologues un peu effrayés, ou les éducateurs un peu effrayés par ces nouveaux types de sujets – qui, encore une fois, ne sont pas des malades mentaux, mais qui présentent un certain nombre de troubles – il faut les aider à mieux les reconnaître, à mieux les prendre en charge. Et c’est aussi de faire le lien entre tous ces professionnels. Et je dirais qu’actuellement on s’aperçoit qu’il y a une troisième mission compte tenu de l’ambivalence du contrat social entre le pays et tous ces professionnels, c’est – puisqu’on leur demande de s’occuper des délinquants sexuels, mais en même temps, quand il y a un problème, quand il y a une récidive, et les récidives c’est inévitable, il y a une stigmatisation qui est terrible, de ces personnes, de ces professionnels, de ces encadrants, et donc il y a une sorte de besoin, chez tous ces professionnels, de se retrouver ensemble et de se conforter mutuellement, d’échanger et de ne pas rester seuls dans leur coin, parce que ce sont des responsabilités qui sont terribles.
Pour bien comprendre de quoi il s’agit, comme le disait Daniel Zagury, ce n’est pas de la pathologie donc il faut qu’on comprenne les mécanismes, il faut qu’on comprenne le pourquoi de cette violence. Et puis comment nous on peut créer un espace pour aider à ce que ça ne se reproduise pas, évidemment, parce que l’idée fondamentale derrière tout ça, c’est d’aider à ce qu’il n’y ait plus de nouvelle victime, bien évidemment. Donc premièrement des actions de formation, deuxièmement des séminaires aussi pour réfléchir sur ces questions. Donc on permet aux professionnels de venir avec des cas, des gens qu’ils ont dans leur institution, qui leur posent problème – parce qu’il y a quand même beaucoup de personnes qui ont aussi dans leurs consultations, ou bien dans des institutions, des agresseurs sexuels, donc ils peuvent venir exposer la situation et on peut essayer ensemble d’y réfléchir et d’y apporter de l’aide. Et puis il y a des réunions de rencontres avec la pénitentiaire, avec les juges d’application des peines, qui nous permettent aussi d’avancer ensemble sur toutes ces questions, sur l’agression sexuelle, et surtout sur cette prise en charge – parce que c’est ça qui nous importe, évidemment, d’arriver à ce qu’il n’y ait pas, on ne travaille pas pour qu’il n’y ait pas de récidive, mais c’est quand même en toile de fond ce que l’on espère tous, évidemment.
Ce qui est important, c’est que toutes ces personnes puissent se rencontrer, échanger, et au fond être soulagés du poids d’interrogations – qui sont des interrogations très difficiles.